Regagner le pouvoir étatique sur les multinationales
L’ouverture par les Nations-Unies de la troisième session de négociation d’un traité contraignant pour les multinationales sur les droits humains est marquée par de grandes mobilisations.
Le Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée des Nations Unies (OEIGWG) sur les sociétés transnationales et autres entreprises et les droits de l’homme entame cette semaine sa troisième session, marquée par une large mobilisation. Avec deux sessions réussies, les négociations seront désormais plus détaillées et plus concrètes sur le contenu du traité. Plus de 300 défenseurs des droits humains suivront et nourriront les discussions pour s’assurer que cette semaine débouche sur un projet de traité qui sera négocié en 2018.
Une impunité effarante, les femmes touchées de manière disproportionnée
Les deux sessions précédentes (2015 et 2016) ont permis un débat riche et ont contribué à l’identification d’un terrain d’entente pour de nouveaux progrès dans l’élaboration du traité : la primauté de la première obligation des États, qui est de protéger les droits des peuples, y compris extraterritorialement. À l’heure actuelle, les lacunes règlementaires entraînent des violations des droits humains ainsi qu’une impunité consternante.
À l’échelle mondiale, les multinationales mènent des opérations qui entraînent des dommages environnementaux profonds, l’accaparement de terres et le recours à de la main-d’œuvre exploitée, la faim et la malnutrition, pour ne mentionner que quelques conséquences d’une liste interminable. Dans un monde encore dominé par les systèmes patriarcaux, cela affecte de manière disproportionnée les femmes et les filles : les rôles qu’elles jouent dans la société et dans leurs communautés, leur santé, y compris prénatale et maternelle, ainsi que la discrimination et la violence sexuelle dans leur vie quotidienne.
La primauté des droits humains
Comme l’affirmait la dernière déclaration de l’Alliance, l’introduction et la réglementation des responsabilités des entreprises, tant au niveau national qu’international, sont nécessaires afin que les États respectent leurs obligations de protéger les droits humains et l’environnement contre les activités néfastes des multinationales et autres entreprises.
Selon Ana María Suárez Franco, représentante de FIAN International aux Nations Unies à Genève, le traité « doit stipuler la primauté des droits humains sur les droits et privilèges des entreprises », qui sont ancrés dans les cadres biaisés des accords commerciaux et d’investissement. Elle affirme que le traité « doit également établir un cadre international solide pour la responsabilité juridique des entreprises afin de garantir l’accès à la justice et aux recours pour les personnes et les communautés touchées, mettant ainsi un terme à l’impunité des entreprises ».
Intégrer une approche par rapport au genre
Sur un point plus spécifique, il est clair que l’intégration d’une approche par rapport au genre dans le traité est cruciale pour assurer plus efficacement la prévention, la protection et la réparation des préjudices contre les femmes et les filles, qui sont souvent laissées pour compte. Les opérations commerciales peuvent avoir des impacts différents, disproportionnés ou imprévus sur les femmes et les hommes, en raison de leurs différents rôles et droits sociaux, juridiques et culturels fondés sur le genre.
Les pays qui aspirent à être des champions des droits des femmes doivent s’engager de manière constructive dans les négociations, car la conclusion du traité sera essentielle pour la pleine réalisation des droits des femmes et des filles, ainsi que la mise en œuvre adéquate d’autres instruments juridiques les concernant.
Au cours de cette semaine de négociations et au-delà, l’engagement des personnes dans le processus est essentielle pour mettre fin aux abus des entreprises. Un soutien est nécessaire, qu’il s’agisse d’encourager les gouvernements nationaux, se mobiliser dans les rues ou diffuser l’info sur les médias sociaux.
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