26 novembre 2018

Les politiques d’austérité doublent l’insécurité alimentaire en Grèce

Nouvelle recherche sur les impacts des mesures d’austérité sur l’alimentation et l’agriculture dans le pays

Un nouveau rapport montre que près de 40% des habitants des zones rurales de Grèce sont menacés de pauvreté et que, dans le même temps, l’insécurité alimentaire a doublé dans tout le pays.

La démocratie n’est pas à vendre : la lutte pour la souveraineté alimentaire à l’ère de l’austérité en Grèce, par TNI, FIAN International et Agroecopolis, offre une analyse unique des impacts des mesures d’austérité sur l’agriculture et la sécurité alimentaire dans le pays.

Les principales conclusions indiquent que :

  • environ 38,9% des citoyens ruraux en Grèce sont menacés de pauvreté ;
  • environ 40% des enfants grecs sont confrontés à des privations matérielles et sociales ;
  • le chômage en milieu rural a grimpé de 7% en 2008 à 25% en 2013, tandis que le revenu rural par habitant a chuté de 23,5% pendant les années de crise (2008-2013) ; et
  • l’insécurité alimentaire a doublé pendant la crise, passant de 7% en 2008 à plus de 14% en 2016.

Le rapport est basé sur un travail de terrain et des entretiens avec plus de 100 acteurs clés à travers 26 sites en Grèce, ainsi que sur une analyse statistique macro-économique et une recherche documentaire. Le rapport montre que la faim, l’insécurité alimentaire, la pauvreté et les privations matérielles sont des conséquences directes des mesures d’austérité imposées à la Grèce par l’UE.

Un certain nombre de réformes structurelles ont considérablement fait pencher la balance en faveur des plus grandes distributeurs alimentaires et des commerçants privés au détriment des petits producteurs.

Ces réformes prévoyaient :

- la libéralisation du commerce de détail, avec par exemple la levée des restrictions sur certains produits vendus dans les supermarchés, la flexibilisation de la législation du travail et le passage au commerce le dimanche ;
- la libéralisation du commerce de gros, en particulier la privatisation de l’Organisation des marchés centraux et de la pêche, le principal opérateur alimentaire de gros du pays qui était auparavant une administration publique et rentable, responsable des deux principaux marchés du pays et de 11 marchés du poisson ; et
- les privatisations, y compris les privatisations de la Banque agricole de Grèce (ATE) et de la grande coopérative laitière AGNO. Les résultats ont entraîné une augmentation des coûts pour les agriculteurs, ainsi qu’un accès réduit au crédit rural, aux services financiers spécialisés et aux conseils agronomiques.

Le rapport conclut qu’une conséquence directe des mesures d’austérité est la violation par la Grèce du droit humain à l’alimentation des personnes au sein de son territoire. En outre, les États membres de la zone euro, en tant que prêteurs directs, sont également responsables étant donné qu’ils ont signé les protocoles d’accord et ont probablement fait pression sur le gouvernement Grec afin qu’il fasse de même. En tant qu’États parties au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et à d’autres instruments internationaux relatifs aux droits humains, les États membres de la zone euro ont donc manqué à leurs obligations extraterritoriales de respecter le droit à l’alimentation en Grèce.

Ce rapport est présenté dix ans après le début de la crise financière et économique, et quelques mois seulement après la fin des programmes d’austérité qui avaient été imposés à la Grèce en tant que condition des « renflouements » successifs. Olivier de Schutter, ancien rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l’alimentation (2008-2014) et membre du Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU, a commenté la publication : « la Grèce est maintenant hors de danger, nous dit-on, mais les impacts sur le niveau de vie des familles grecques et sur le droit à la nourriture en particulier ont été énormes. Et il est essentiel que nous tirions les leçons de ce qui s’est passé. Ces résultats constituent une contribution importante à un débat qui doit maintenant avoir lieu ».

Pour les questions relatives aux médias, veuillez contacter delrey(at)fian.org

Vous pouvez accéder au rapport ici.

MISE A JOUR - 9 mai 2019 :
En cette Journée de l’Europe, d’éminents juristes lancent un appel à l’action afin de garantir que les droits sociaux soient une priorité de la prochaine législature européenne.

Transnational Institute, TNI et FIAN International, ont salué cet appel des experts juridiques dans un communiqué de presse, soulignant également que le message qui y figure va dans le sens du rapport "Democracy Not For Sale : La lutte pour la souveraineté alimentaire à l’ère de l’austérité en Grèce"
A lire ici :

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